Focus sur le Dispositif d’Accueil des Mineurs Isolés Etrangers (DAMIE)
Celui-ci répond à la Convention Internationale des Droits de l’Enfant (CIDE), qui prévoit que « Tout enfant qui est temporairement ou définitivement privé de son milieu familial, ou qui dans son propre intérêt ne peut être laissé dans ce milieu, a droit à une protection et une aide spéciale de l’Etat. » Cette convention concerne tous les enfants jusqu’à 18 ans, quels que soient leurs origines, leur couleur, leur sexe, leur religion.
Basé en Saône-et-Loire, le DAMIE 71 de France Horizon accueille 45 mineurs à Mâcon et 45 mineurs à Chalon-sur-Saône.
Interview de Julien Garcia, moniteur/éducateur au DAMIE 71
* Bonjour Julien, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?
Bonjour, je m’appelle Julien Garcia et je suis à France Horizon depuis 2016. C’est au mois de juin de la même année que j’ai intégré le DAMIE 71 de Mâcon. D’abord au sein du service « Insertion », avant d’intégrer le service « urgence » d’accueil et de mise à l’abri des primo-arrivants, lesquels doivent être pris charge dès leur arrivée. Et je suis aujourd’hui revenu sur le service « Insertion ». Ces 2 services ont en quelque sorte fusionné depuis 1 an pour en devenir un seul. En conséquence, certains mineurs ont dû être pris en charge par l’antenne France Horizon de Chalon-sur-Saône.
* Quel est votre rôle au sein du DAMIE 71 ?
Je suis moniteur/éducateur de formation. C’est-à-dire que j’accompagne dans l’insertion des jeunes mineurs non accompagnés âgés de 15 à 18 ans. Notre mission, c’est d’accompagner ces jeunes afin qu’à leur majorité, ils puissent devenir autonomes et réaliser une demande de titre de séjour, suivant leur projet. Généralement, chaque éducateur s’occupe de 7 à 8 jeunes et je dirais que notre objectif principal est de tisser du lien, de créer une relation de confiance afin d’amener ces jeunes vers leur autonomie dès lors qu’ils auront 18 ans.
« Notre mission, c’est d’accompagner ces jeunes afin qu’à leur majorité, ils puissent devenir autonomes. Ensuite, selon leurs projets, ils pourront réaliser une demande de titre de séjour. »
* Quel est le processus d’accueil de ces jeunes mineurs ?
Ces mineurs viennent tous de pays étrangers notamment des pays d’Afrique de l’Ouest, d’Albanie, mais également du Pakistan ou du Bangladesh. Ils sont d’abord pris en charge par l’Aide sociale à l’enfance puis ils sont redirigés vers notre établissement, sachant qu’une évaluation préalable est réalisée afin de déterminer s’ils sont bien mineurs et n’ont aucun parent et/ou proche sur le territoire français. Si tel est le cas alors l’Etat français se doit de les protéger jusqu’à leur majorité. Une fois leur majorité atteinte, ils sont orientés vers des solutions d’hébergement et des structures sociales d’accompagnement adaptées.
* Pouvez-vous nous décrire votre journée de travail au quotidien ? Comment se décompose l’accompagnement social que vous déployez ?
Je n’ai pas vraiment de journée type, mais je dirais que mon travail au quotidien s’organise autour de 4 missions principales qui sont les suivantes :
* L’accompagnement vers l’accès aux soins physiques et psychologiques
Venant tout juste d’arriver sur le territoire français et ayant subi des traumatismes liés à leur parcours d’immigration et de vie, ces jeunes doivent obligatoirement passer des tests médicaux (sérologie, maladies infectieuses, check-up complet…). En effet, certains d’entre eux n’ont jamais vu de médecin et sont donc susceptibles d’avoir des problèmes médicaux. Une infirmière et une psychologue sont présentes au sein du DAMIE pour faire ce travail, en lien bien évidemment avec les éducateurs.
* L’accompagnement scolaire et éducatif
En France, l’instruction est obligatoire pour tous les enfants, qu’ils soient français ou étrangers, jusqu’à l’âge de 16 ans. On se doit donc de les inscrire au plus vite à l’école, ou de leur trouver des stages en entreprise. En premier lieu, c’est le CIO (Centre d’information et d’Orientation) qui collecte un maximum d’informations sur le parcours de ces jeunes puis il les oriente afin de faire des tests plus approfondis auprès des collèges et des lycées.
»Ces jeunes ont une motivation sans limite, une envie d’apprendre incroyable et une curiosité sans borne. »
Selon les résultats obtenus, ils sont envoyés dans des classes adaptées à leurs niveaux. Pour les jeunes de plus de 16 ans, ils sont réorientés selon leur projet, leurs souhaits et selon les places disponibles. J’ai par exemple eu le cas d’un jeune de 16 ans qui souhaitait s’orienter vers un CAP bien précis, mais malheureusement, aucune école à Mâcon ni dans le département ne proposait cette filière.
* L’ACCOMPAGNEMENT ADMINISTRATIF
Mon travail consiste également à trouver l’équilibre entre les aspects administratifs et éducatifs. En France, les démarches administratives sont très lourdes et en ce qui me concerne, je dois faire de nombreuses demandes de titre de séjour, faire des démarches auprès des ambassades pour les passeports, etc..
« Dans mon métier, il faut savoir trouver le juste équilibre entre l’aspect administratif et l’aspect éducatif. C’est probablement ce qu’il y a de plus compliqué à gérer. »
* L’accompagnement dans l’intégration « des codes » de la vie quotidienne
J’interviens également dans tous les enjeux de la vie quotidienne. Ces jeunes sont hébergés dans des logements en diffus et sont en colocation. Donc, ma mission ici, consiste à leur transmettre des codes, des règles ou des savoir-faire dans la gestion de leur appartement, comme par exemple, leur apprendre comment nettoyer leur appartement, comment gérer leurs papiers administratifs, quelles sont les choses à acheter pour l’entretien de leur logement, mais également leur montrer comment se déplacer seul en ville, leur expliquer quel bus prendre pour se rendre à tel endroit, etc.
* Pour finir cette entrevue, auriez-vous une anecdote ou une belle histoire que vous souhaiteriez partager ?
Oui, bien sûr, j’en ai pas mal, mais celle-ci me touche plus que les autres, car c’est de là que je tire une certaine reconnaissance. Je me suis occupé d’un jeune, il y a quelques années et lorsqu’il a atteint sa majorité, il a fait une demande de titre de séjour qui a été acceptée. Il a obtenu une carte de séjour ce qui lui a permis de rester sur le sol français.
Il a donc pris son autonomie, puis un jour, il m’a appelé en me disant qu’il avait besoin d’aide pour remplir d’autres papiers officiels (les fameuses lourdeurs administratives…). Ce fut l’occasion de se revoir, de discuter, de faire un point sur le chemin parcouru et ses projets… et quel plaisir que de voir qu’il a désormais un emploi stable et qu’il est sur le point de se marier ! Je l’ai connu tout jeune avec son passé et ses problèmes et maintenant, quand je le vois dans sa « nouvelle vie », heureux et intégré, je me dis que j’ai fait du bon boulot !
Permettre aux mineurs isolés de trouver un accueil d’urgence, de bénéficier d’une protection dans des lieux sécurisés ainsi que des accompagnements personnalisés, c’est un devoir d’humanité auquel France Horizon prend part avec l’appui du Conseil départemental de Saône-et-Loire, lequel finance le DAMIE 71 de Mâcon et de Chalon-sur-Saône depuis son ouverture en 2015.